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Where the dream becomes true

Johannesburg sous le signe de l'Apartheid

30 Décembre 2016, 13:28pm

Publié par Jeje

Johannesburg

Dernière étape de notre voyage, Jo'burg (comme ils disent là-bas) est la capitale économique d'Afrique du Sud. C'est sa voisine Pretoria qui accueille les pouvoirs politiques et qui est la capitale administrative.

Capitale économique du pays, il s'agit de la ville la plus riche d'Afrique mais aussi de la ville présentant un des taux de criminalité les plus élevés au monde. Ville de tous les contrastes, à l'image de ce pays marqué par une des pires ségrégation raciale que le monde ait connu.

Nous passerons à peine 48h dans cette ville de 3,5M d'habitants. A peine le temps de renouer avec l'urbanisation, les immeubles tout gris dans un ciel tout aussi gris et pollué. Nous voilà au milieu de la circulation d'une mégalopole avec ses axes dans tous les sens, ses bouchons, et le tout sans GPS, en navigant simplement grâce aux cartes touristiques et aux plans du guide du routard...

Nous n'irons pas voir Soweto, ce ghetto tristement célèbre et aujourd'hui reconverti en banlieue tendance où l'on peut aller photographier des gentils noirs qui s'en sont sortis socialement... Pas trop notre tasse de thé !

Pour comprendre ce qu'est aujourd'hui l'Afrique du Sud, il faut s'intéresser à son histoire et plus particulièrement à celle de la seconde moitié du XXème siècle, celle de l'Apartheid. Nous irons donc faire un tour au musée qui y est dédié.

Comme à la "grande" époque, l'entrée dans le musée se fait avec deux files, une pour les Blancs, une autre pour les Noirs...

Comme à la "grande" époque, l'entrée dans le musée se fait avec deux files, une pour les Blancs, une autre pour les Noirs...

Ce musée n'est pas super "facile", il y a beaucoup de lecture, peu d'interactivité et de ludisme, mais il est néanmoins très intéressant et riche.

A la différence, par exemple, du musée sur la Guerre du Viêt-Nam, de Saïgon, où on nous explique que les méchants américains, qui ont fait les pires atrocités de la Terre, se sont fait défoncer par des gentils Vietcongs, nous sommes ici dans quelque chose de beaucoup plus factuel et moins orienté, qui retrace l'histoire et les origines de 40 ans d'oppression et de lutte.

Brèves d'histoire : Avant le XXe siècle

A l'arrivée des colons hollandais en Afrique Australe, les terres, qu'on appelle aujourd'hui Afrique du Sud, étaient occupés par différents peuples nomades qui vivaient principalement de l'élevage. Les Boers (hollandais) s'installent et cohabitent avec les peuples autochtones entre élevage et agriculture. Les français sont rapidement passés par là à cette époque. C'est pour cela, qu'aujourd'hui, des joueurs de rugby s'appellent Du Plessis ou Le Roux et que ce pays est un producteur de vin reconnu !

Les choses se compliquent à l'arrivée des anglais qui se révèlent être beaucoup moins délicats. Le mode "je viens vivre avec vous et on partage" n'est plus trop d'actualité. Les peuples nomades sont les premiers à prendre et les Boers sont repoussés vers des terres moins fertiles et propices à l'élevage (montagne, savane).

A la fin du XIXème siècle, les richesses des sous-sols sont découvertes (diamants, or...) et la guerre éclate entre hollandais et anglais, c'est la guerre des Boers (1899-1902). Les anglais en ressortiront vainqueurs. S'en suit, en 1910, la création de l'Union Sud Africaine, sous dominion du Commonwealth. Les pouvoirs politiques sont plutôt attribués aux Afrikaners (hollandais) tandis que l'économie est détenue principalement par les anglais.

L'ANC (African National Congress) est fondée en 1911 en réponse aux lois racistes mises en place par le nouveau gouvernement pro-Blanc (les Afrikaners préfèrent se rallier aux colons anglais et créer une suprématie blanche).

L'optimisme économique et l'immigration (majoritairement anglaise), qui accompagnent la croissance de l'activité minière, laisse rapidement place à des tensions et des conflits sociaux, qui commencent à éclater entre ouvriers et patrons blancs. Les patrons préfèrent se tourner vers une main d'oeuvre noire bien moins chère, tandis que les ouvriers blancs veulent garder leurs salaires (pour lesquels ils ont immigrés).

En 1924, une alliance entre ouvriers blancs et fermiers boers forment un gouvernement de travailleurs et mettent en place un système ultra-protectionniste. C'est le début d'une ségrégation raciale où les Noirs se verront interdire tout droit de résider dans les villes (naissance des ghettos) ou encore d'avoir accès à un travail qualifié, réservé aux Blancs.

L'Apartheid

Les flux migratoires africains, conséquence des problèmes économiques liés à la Seconde Guerre Mondiale, engendrent une déstabilisation sociale sans précédent en Afrique du Sud. C'est ainsi que le Parti National Afrikaner arrive au pouvoir sur le thème du "péril noir". L'Apartheid est officiellement lancé !

  • Séparation physique Blancs vs Noirs
  • Désurbanisation forcée
  • Déportation des Noirs
  • Classification de la population par race (Blanc, Noir, Métis) avec différents droits
  • Interdiction des mariages mixtes et criminalisation des relations sexuelles blanc/noir
  • Services séparés (hôpitaux, écoles, bancs publics...)

Entre autre... Les non-Blancs iront même jusqu'à être bannis du système éducatif national...

Dans les années 50, des campagnes de désobéissance, plutôt pacifiques (manifs, grèves) sont lancés par l'ANC et les autres organisations pro-Noirs.

En 1962, Nelson MANDELA crée la branche armée de l'ANC. Il se fait arrêter la même année, en compagnie d'autres hauts représentants de la lutte pour les droits des Noirs. Il sera emprisonné sur la tristement célèbre Robben Island.

Au début des années 70, des vagues de grèves violentes sont conduites par Steve Biko, le Che Guevara africain. Soweta s'embrase en 1976. Biko est assassiné en 77. Les années 80 connaissent une escalade de la violence avec un ANC militarisé et entraîné dans des camps en Angola, au Mozambique ou en Zambie. Une véritable guérilla, qui participe a des sabotages et des assassinats, voit le jour.

En réponse, la répression se fait de plus en plus forte en Afrique du Sud et à l'extérieur du pays.

Les forces spéciales Sud Africaines organisent des attentats ciblés, dans les pays voisins. L'ANC est soutenue par le bloc communiste, tout comme les pays voisins, tout juste sortis de la colonisation occidentale. L'argument diplomatique consiste en des "missions de défense des valeurs occidentales contre le communisme athé" avec pour but de déstabiliser ces pays soutenus par Cuba, l'Union Soviétique ou la Chine.

Dans ce contexte de Guerre Froide, la position des grandes puissances occidentales est ambiguë, pour ne pas dire bancale ou malhonnête. Face à une morale qui devrait boycotter un tel régime, les enjeux politiques incitent plutôt à appuyer un gouvernement qui s'oppose à une cause, soutenue par les mouvements marxistes.

Quelques embargos sur les armes ou le charbon verront le jour, le CIO exclura l'Afrique du Sud des JO de Mexico en 1968... Mais aucune intervention internationale ne sera envisagée contre ce régime, pourtant fortement critiqué.

Vers des jours meilleurs

La suite vous la connaissez. Mandela sera libéré le 11 février 1990, après 27 ans et 190 jours de détention.

De Klerk et Mandela recevront le prix Nobel de la paix en 1993.

Les premières élections démocratiques multiraciales auront lieu en avril 1994 et Mandela deviendra le premier président Noir d'Afrique du Sud, avec comme mot d'ordre, la réconciliation des peuples. Quand la haine laisse place à l'intelligence...

Merci Monsieur...

Merci Monsieur...

Mandela quittera la scène politique en 1999 après avoir donné un nouvel élan démocratique, économique et social à son pays. Un pays pour lequel il se sera battu toute sa vie.

Depuis, les Noirs sont toujours au pouvoir mais les clivages socio-économiques sont encore trop présents. Ils ne sont plus raciaux législativement parlant, mais l'histoire laisse des traces que seul le temps pourra estomper. Le clivage noir/blanc est encore bien là, il se voit au quotidien, dans la rue, même si officiellement, tout le monde est égal.

L'Afrique du Sud connait aujourd'hui des problèmes économiques, sa croissance a ralenti, la corruption est omniprésente, des affaires gouvernementales éclatent tous les jours, les grèves et les événements sociaux sont monnaie courante dans l'actualité...

Y a du mieux, même si tout n'est parfait. La route est encore longue pour unifier la Nation Arc-En-Ciel !

Ce qui m'inquiète le plus en rédigeant cette page d'histoire, c'est le parallèle que l'on peut faire entre l'histoire de ce pays et l'actualité mondiale. Remplacez "Noirs" par "Arabes" et "ressources minières" par "pétrole", on actualise avec une colonisation politico-financière au lieu d'une colonisation physique... Je vous laisse maître de votre analyse pour la suite, mais c'est à croire que l'être humain n'est pas capable d'apprendre de la connerie de son voisin.

Bonne réflexion et à bientôt pour de nouvelles aventures. :)

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